mardi 7 septembre 2010

Deux textes

Ce sont deux textes. Sans opinion, sans foi. Juste une vulnérabilité, une nostalgie, une sentiment de dépossession.

À ma petite
Quand il viendra, elle n’aura pas encore le droit de conduire, juste le devoir de s’instruire, Elle rougira de honte lorsqu’on lui demandera comment s’appelle son petit frère. Elle sera seule jusqu’à minuit, les soirs de fête dans une maison peu spacieuse pour les rêves de princesse. Elle aura vingt ans quand il fêtera son cinquième anniversaire.

Elle aura le double de son âge et aura l’impression qu’il la rattrape. Jeune et belle. Trente ans ce n’est rien. Peut-être grand-mère à l’âge où certains s’achètent leur première maison.

Il lui en voudra à seize ans de ne pas avoir été à la hauteur. Se lamentera comme une bête pour une paire de chaussures neuves qu’il n’aura jamais portée. Traduira son manque par un silence. Son silence par la jeunesse, l’insouciance, l’irresponsabilité de ses parents. Il criera qu’il est un accident et il aura mille fois raisons.

Mais il aura ses yeux à elle. De la douceur dans ses gargouillements. De la splendeur dans ses maladresses. L’envie de vivre dans ses tétées. Quand il viendra.



Enfant

Une maison qui ressemble à toutes les autres. Le vert des murs, le brun des poutres. Des marches presque pas défaites, juste quelques fissures de bois qui marquent le temps. Elle a mon âge, une vingtaine d'années à se tenir debout, immobile, sédentaire. Mes empreintes, celle que j’ai laissées lors de mes premiers pas, celles que je laisse encore quelques fois lors des fin de semaines prolongées. Ma mesure, de petites rayures sur fond blanc qui marquent mon enfance jusqu’à mes sept ans. Une chambre parfaite pour trois petites filles et une autre juste à côté pour un frère aîné qui n’aime pas se chamailler.

Derrière elle, il y avait un bois, petit, à notre grandeur. Des framboises et des bleuets, mis là exprès pour les journées chaudes de juillet. Les épinettes étaient rabougris, mais ils soutenaient les quelques planches en bois que mon frère avait clouées en guise de barricades. Aujourd’hui, c’est un dispensaire et un dépanneur. La clôture qui séparent la maison du stationnement n’arrête ni les soûlons, ni les autres.

Ma mère tente de faire pousser du gazon sur du sable et je la félicite chaque fois que je vois les quelques bouquets de trèfles qui se brandissent les feuilles. Il faudrait aussi refaire les fenêtres, les planchers et la peinture des murs. La maison a vieillit au même rhytme que le mien je suppose, même si les choses vieillissent plus vite par là-bas, d’où je viens. Personne ne s’en rend compte, mais elles vieillissent et puis elles meurent.



Merci d'avoir écouté

1 commentaire:

  1. Je te lis et je vois toutes les images défilées dans ma tête....Tes bonne Nao!

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