Ma mère parle peu de son enfance. Lorsque ça lui arrive, elle parle surtout de repas. Elle dit il n'y avait pas de légumes, pas de fruits, on mangeait surtout des pâtes. J'allais chez ma soeur plus vieille pour boire du lait de vache, on avait pas de lait de vache chez-nous. Elle dit du lait de vache et ça me fait rire. Je n'ose pas demander quel sorte de lait elle buvait dans sa maison. Elle trouve ça drôle, un peu comme je trouve drôle moi aussi d'avoir eu à porter les vêtements usés de mes soeurs. Personne n'en meurt. J'essaie de voir à quoi elle ressemblait cette réserve, ce village pauvre, habité par des gens pauvres, qui subsistaient à grandes poches de patates et de farine.
Puis j'entends parler d'une réserve, dans le nord de l'Ontario, la belle et riche province, l'Ontario. Ces échos de pauvreté in-crédible jusque dans nos téléjournaux locaux québécois. Attawapiskat, un village que je ne connaissais pas avant de voir la photo de presse d'une cabane construite moitié en toile, moitié en planches. On n'y croit pas. Encore de ces exceptions généralisées. On voit les vieux et les enfants, les parents inquiets et les cabanes qui se multiplient. C'est un village tout entier. Ce sont des membres des Premières Nations, des Canadiens. C'est la minorité invisible. Ceux qui habitent des parcelles de territoire réservées. Attawapiskat, fondé en 1950. Près de deux milles habitants. À quel moment ces gens ont-ils choisi d'être pauvres? Car si on peut créer la richesse, on peut également créer la pauvreté.
Je déteste le mot "réserve", comme je déteste l'idéologie que renferme ce mot. Je suis outrée par la péjoration, par le racisme et le cloisonnement de ce mot. Mais je l'utiliserai. Je continuerai à parler des réserves tant qu'elles existeront, tant que la loi canadienne et les normes sociales resteront les mêmes. Toutefois, je ne suis pas désabusée, au rythme où vont les choses, dans le cri grandissant des premiers peuples, je sais qu'un jour elles changeront.
me ramène au jour où à Qc/Laval t'ai entendu pour la première fois lire un texte sur la réserve, même émotion, même densité, partage
RépondreSupprimerBonjour Naomi,
RépondreSupprimerJ'ai eu la chance de vous entendre ce matin à l'émission de Catherine Perrin. Je trouve que vous exprimez très bien. J'ai trouvé intéressant vos explications sur le sens profond et la joie que les jeunes femmes Innues ont de donner naissance alors qu'elles sont encore adolescentes. J'ai cependant tiqué lorsque vous avez dit que logiquement elles ne devraient pas porter à terme ces grossesses. Madame Perrin, en bonne Québécoise moderne, a évidemment acquiescée.
On ne met pas un terme à une vie humaine tout à fait pure et innocente, logiquement ou autrement. Malheureusement, aujourd'hui on tue des êtres innocents de tout crime au nom de la liberté...
Heureusement vos propos pleins d'espérance et de chaleur humaine rachètent quelque peu ce ''logiquement''.
Je suis heureux de vous avoir connu.
Yves Petit
Dollard-des-Ormeaux
yp251@yahoo.ca
PS: C’est curieux que vos propos sur le bonheur de donner la vie ait eu lieu le 8 décembre, jour de l’Immaculée Conception
Merci..en fait j'ai tiqué moi-même sur mon "logiquement".
RépondreSupprimerJe suis très touchée par vos mots et très heureuse qu'ils voient jour et qu'ils aient un lieu pour exister. Je vous souhaite la fin fin de tout ces silences.
RépondreSupprimerLes blancs qui parlent des premiers peuples devraient le faire avec réserve.
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