jeudi 17 février 2011

Pourquoi j'aime Félix

Je l'ai lu pour la première fois il y a quelques années, Adagio de Félix Leclerc. Un recueil de nouvelles que l'on dévore d'un bout à l'autre. Des scènes de campagne, de terre labourée, du désastre que cause le feu et de l'amitié concrète entre habitants d'un même pays. Le pays, tel que Félix le concevait. Un peuple pauvre mais fort. Une territoire rigoureux mais riche. La fierté comme idéologie à une époque où " il faisait gris, presque brun."

Je l'ai relu dernièrement. Et je l'ai aimé davantage si c'est possible. Un poète qui parle de son chez-lui, comme on parle de sa chérie. "Son église, un matin de novembre froid et plein de lumière. Il avait neigé la nuit. L'air était pur, les routes, blanches." Cette terre qu'il dépeint, ces visages, ces vies, c'était il y a longtemps. L'amoureux fou de la belle Marie et le violoniste aux rhumatismes. Ça ne s'invente pas.

J'aime Félix. Comme j'aime les traditions, les convictions, les imperfections, l'espace, l'hiver. J'aime Félix parce qu'il raconte une collectivité. L'histoire des autres, des siens. Des vérités sordides qui nécessitent l'apport d'une belle poésie.

Mais j'aime Félix pour une autre raison. S'il vivait encore je me dis que nous nous serions bien entendus,avec au coeur le même combat d'exister. Nous aurions parler de changements, de peuple, de pays à nos risques et périls. Il a inspiré énormément d'artistes Québécois, et Innu, et autres petites gens qui en dehors de l'individualité, ont voulu croire en la race.

jeudi 10 février 2011

Dilemme

J'aimerais vous parlez de la pièce de théâtre que j'ai vue hier. Vous dire pourquoi le génie humain me touche lorsqu'il me surprend, assise sur la dernière rangée du fond alors qu'une vieille dame se permet des soupires de rire entre deux coup d’œil dans ses jumelles de luxe. J’ai hâte d’avoir son âge. J’aimerais encenser la pièce jusqu’à la rendre intouchable, pas seulement parce que le berceau de son auteur est Québec, mais parce qu’il arrive a rendre le regard des gens normaux spectaculaire, presque magique.

Mais ce n’est pas ça. Hier, j’ai lu aussi. Un journal sur le coin d’un bureau à la radio communautaire où je travaille. Un article sur le Grand Nord Québécois. S’avez, le Grand Nord n’est pas aussi loin qu’on s’imagine. C’est juste isolé. L’article débutait avec l’énumération des nombreux problèmes sociaux des communautés Inuites. Un paragraphe pour faire le tour. Suffit de mettre les mots qui comptent : alcoolisme, pénurie de logements, suicide, pauvreté. Ces réalités qui ne nécessitent aucun superlatif.

Mais ce n’est pas ça. L’article parlait d’un fléau plus récent. Récent ou très ancien. Depuis quelques années, la tuberculose est en hausse dans les foyers trop étroits, mal aérés, surpeuplés des habitants du Nord. Cette maladie aux allures d’une grippe, mais qui affecte le corps avec beaucoup plus de violence et s’installe en lui avec des odeurs de morts. Toute la journée j’ai imaginé une cabane en bois habités par des toussotements. Un crachat de sang dans un mouchoir et un paysage de neige pour voisinage. Le tiers monde existe au Québec. Il est isolé, mais pas si loin.

Ressasser l’article toute la journée, jusqu’à huit heure moins quart. Quelques minutes avant le début de la pièce. La vieille femme toussote, l’homme avec elle est galant. Les lumières s’éteignent. Et tout le génie créateur de Robert Lepage apparaît, petit à petit. Un sourire sur mes lèvres. Je partage l’humeur rieuse de ma voisine. Le destin de deux frères, leurs différences, la rivalité et la face cachée des choses humaines. L’éblouissement certain d’un homme qui s’envole.

Aujourd’hui, prise dans le dilemme de décrire la beauté ou le désastre.