Il m’arrive, devant autant d’encouragements et d’approbations et de félicitations, dus à mon livre, de me dire que je ne le mérite pas. J’en suis consciente, ma mère plus que moi. Les gens m’invitent pour que je puisse parler de mon livre à des classes, à des publics, et j’accepte sans savoir ce que je leur raconterai. À quel moment me suis-je forgé une opinion solide sur l’écriture, sur ma culture, sur mon propre livre? Elle m’est tombée dessus, cette notoriété ou appelez ça comme vous voulez. Le fait que ma parole soit écoutée. C’est presque incroyable. Je ne pense pas en avoir rêvé avant. Voulez savoir ce à quoi je rêvais, avant?
Je rêvais d’une maison, petite, bâtie exprès pour moi. Sur le bord de la mer, tout près de l’eau, la Côte-Nord qui longe le fleuve. Une maison en bois avec une galerie peinte en blanc. Derrière, la forêt épineuse. Enseigner aux jeunes de mon peuple. Leur dire tous les jours qu’ils sont les meilleurs. Leur apprendre le français et la fierté d’être soi. Apprendre d’eux le façonnement du savoir, l’éternelle mutation des idées. Leur souhaiter bonne route et recommencer, sans cesse. J’ai bien rêvé d’un livre à publier, quelque part entre les boires du matin et les devoirs à finir. Quelque part entre ma solitude et les veillées tardives.
Aujourd’hui, je regarde la route des possibles. Je l’avoue. Je ne croyais pas que la vie était si vaste. Fluide même, capable de se glisser entre les convictions et le quotidien monoparental. Le mondial et les jouets qui traînent. Je savais, ou j’aime croire que je savais, que rien n’est impossible. Pourtant, plus le rêve devient palpable, plus tout me semble irréel.
Et puis tout ce qui me vient en tête ces jours-ci, le goût d'écrire quelque chose de neuf.
Mais pas pour le rêve, pas pour les autres. Juste pour la poésie qui m'appartient.
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